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L'immigration nuit à nos infrastructures et à l'environnement ? FAUX !

A deux mois du vote sur l'initiative de résiliation, nous nous retrouvons dans une situation similaire à celle du vote sur l'initiative Ecopop. Les arguments des initiants sont les mêmes qu'à l'époque : l'immigration entraîne la surcharge des infrastructures suisses et nuit à l'environnement. Mais le recyclage de cet argument ne le rend pas plus acceptable. Non seulement il ne correspond pas à la réalité, mais il est aussi de mauvaise foi.

par Nicolas Zahn, Co-responsable du groupe de travail Politique numérique d'Opération Libero

Nous l'avons entendu avec l'initiative sur l'immigration de masse, nous l'avons entendu avec Ecopop et nous l'entendons encore avec l'initiative de résiliation : l'immigration détruirait notre pays ! Trains bondés, embouteillages, loyers trop élevés, l'immigration serait la cause de tous les maux. A entendre ces arguments, la libre circulation des personnes devrait être abolie afin de mieux protéger nos infrastructures et notre environnement. Un argument qui pose au moins deux problèmes : premièrement, il ne correspond pas aux faits et deuxièmement, il est de mauvaise foi.

Tout d'abord, les faits. Depuis l'introduction de la libre circulation des personnes, peut-on vraiment dire que la qualité de notre environnement et de nos infrastructures s'est massivement dégradée ? Non. Par exemple, une étude réalisée pour l'Union des villes suisses démontre que l'immigration n'a pas entraîné de détérioration de la qualité de vie, ni d'effets négatifs directs liés à l'étalement urbain. L'augmentation de la demande de logements est principalement liée à l'augmentation du nombre de ménages individuels et aux exigences en matière de taille des appartements, que nous voulons toujours plus grands. D'ailleurs, les personnes immigrées occupent en moyenne moins d'espace que les Suisses pour se loger. Cette réalité est confirmée par une étude bibliographique approfondie réalisée par la Commission fédérale des migrations. Cette étude conclut également que les problèmes liés à la surcharge des transports publics ont moins à voir avec l'immigration qu'avec des horaires de travail trop rigides qui entraînent des pics de charge importants.

Que l'argument selon lequel l'immigration nuit à notre environnement et à nos infrastructures ne puisse être étayé par des faits est une chose. Mais ce n'est pas tout : c'est aussi de mauvaise foi. Voici une réflexion : imaginez une Suisse sans immigration et qui connaîtrait néanmoins une forte croissance en raison d'un baby boom. Le taux de natalité y serait deux fois plus élevé qu'aujourd'hui, c'est-à-dire à un niveau comparable à celui du début du XXe siècle. Les familles auraient donc besoin d'appartements plus grands, de plus d'écoles, de meilleures infrastructures pour circuler, etc. Dans une telle situation, celles et ceux qui souhaitent aujourd'hui limiter la croissance démographique en prenant des mesures contre l'immigration lutteraient-ils avec autant d'ardeurs contre la croissance liée au baby-boom ? En allant jusqu'à distribuer des contraceptifs afin de garantir suffisamment de places dans les trains ? On n'ose pas l'imaginer.

Sérieusement : que l'on parle de 5, 8 ou 10 millions d'habitant·es, la Suisse est en train de changer. Et quiconque souhaite éviter que nos conditions de vie ne se détériorent en raison de la croissance démographique doit se concentrer sur des réformes de politique intérieure. Numérisation, aménagement du territoire, politique des transports, énergie, protection de l'environnement : voilà les enjeux sur lesquels il nous faut agir pour relever les défis de demain. Les politiques d'aménagement du territoire et des infrastructures constituent de meilleurs outils que le dénigrement des personnes immigrées. Nous avons par ailleurs besoin de modèles de travail plus flexibles, et non des rigidités et tracasseries administratives proposées par l'UDC, l'ASIN et l'association Ecopop avec l'initiative de résiliation.

Car cette initiative ne prévoit rien qui puisse contribuer à un environnement plus sain et à de meilleures infrastructures. Au contraire : en se concentrant à tort sur la question d'immigration, elle nie tout simplement les véritables enjeux.

Sans oublier que cette initiative met en péril, de manière irresponsable, nos libertés et nos bonnes relations avec nos partenaires européens. Autant d'acquis pour lesquelles nous nous sommes battu·es au cours des dernières décennies. Nous ne l'accepterons pas et appelons au rejet clair de l'initiative de résiliation.

 

PS: Les électrices et électeurs ont rejeté l'initiative Ecopop ("Halte à la surpopulation - Oui à la préservation durable des ressources naturelles") en novembre 2014 par 74,1 % de "non". Nous devons mettre tout en œuvre pour que le "NON" à l'initiative de résiliation soit au moins aussi clair.